Le 3 septembre dernier, Bercy a répondu à l’interrogation du Sénateur FRASSA quant à la prise en charge des cotisations sociales attachée à des dividendes versés par une SARL. Cette question, et surtout la réponse liée, soulèvent aujourd’hui des interrogations pratiques. Nous vous proposons une interview de Pierre-Yves LAGARDE qui nous livre son analyse à chaud.

Stéphane PILLEYRE

Bonjour Pierre-Yves,

C’est avec un plaisir non dissimulé que je vais recueillir ton analyse relative à la prise en charge des cotisations sociales attachée à des dividendes versés par une SARL. C’est un thème que tu affectionnes tout particulièrement car, depuis 2013, de nombreuses questions se posent autour de ce mécanisme anti-abus. Peux-tu rapidement revenir sur la genèse des dispositions de l’article L131-6 du code de la sécurité sociale.

Pierre-Yves LAGARDE

Bonjour Stéphane,

Effectivement, lorsque les professions libérales ont pu exercer au travers de SEL relevant de l’impôt sur les sociétés, des abus ont été très rapidement identifiés, particulièrement par les caisses de retraite des professions libérales. En effet, certains avaient compris (à tort ou à raison, mais plutôt à tort) que les dividendes étaient plus favorables qu’une rémunération soumise à cotisations sociales. Dès lors, des gérants majoritaires de SEL ont diminué drastiquement leurs rémunérations, pour privilégier les distributions.

Un contentieux s’est rapidement installé entre ces gérants et leurs caisses de retraite. Le législateur est intervenu dès 2009, en assujettissant aux cotisations sociales les dividendes de SELARL excédant 10% du capital social, majoré des comptes courants d’associés et des primes d’émission.

Cette mesure a ensuite été étendue à tous les gérants majoritaires de SARL en 2013.

Stéphane PILLEYRE

Merci Pierre-Yves, peux-tu nous donner une illustration chiffrée ?

Pierre-Yves LAGARDE

Bien sûr Stéphane, avec plaisir.

Prenons l’exemple d’un gérant majoritaire relevant du régime de prévoyance et de retraite du SSI, car il est commerçant, artisan ou industriel.

Sa rémunération en 2020 est de 50 000 €. Il perçoit en outre, cette année un dividende en raison d’une distribution de réserves à hauteur de 150 000 € (le capital est considéré comme nul afin que l’intégralité des dividendes soit soumise à cotisations sociales).

Voici le détail des cotisations sociales selon qu’il déclare uniquement sa rémunération (soit 50 000 €) ou le cumul (soit 200 000 €).

Assiette des cotisations 50 000 € 200 000 €
Items Taux Base Cotisation Taux Base Cotisation
Maladie + IJ 7,20% 50 000 3 600 7,20% 50 000 3 600
Allocation familiale 1,19% 50 000 597 1,19% 50 000 597
Retraite de base 1 17,15% 41 136 7 055 17,15% 41 136 7 055
Retraite de base 2 0,60% 50 000 300 0,60% 50 000 300
Retraite complémentaire 7,00% 41 136 2 880 7,00% 41 136 2 880
Retraite complémentaire 8,00% 8 864 709 8,00% 8 864 709
Invalidité – décès 1,30% 41 136 535 1,30% 41 136 535
Formation professionnelle 0,25% 41 136 103 0,25% 41 136 103
CSG déductible 6,80% 65 778 4 473 6,80% 65 778 4 473
CSG non déductible 2,40% 65 778 1 579 2,40% 65 778 1 579
CRDS non déductible 0,50% 65 778 329 0,50% 65 778 329

 

En résumé :

  • Avec 50 000 € de rémunération, les cotisations sociales sont de 22 158 € dont 20 251 € déductibles.
  • Avec 200 000 € de rémunération et de dividendes, les cotisations sociales sont de 66 742 € dont 58 717 € déductibles.
  • Par différence, les cotisations sociales sur dividendes sont de 44 584 €, dont 38 466 € déductibles, soit respectivement 29,71% et 25,64% de 150 000 €.

Stéphane PILLEYRE

Toujours aussi précis Pierre-Yves ! Maintenant, venons-en aux faits. Comment doivent être traitées ces charges sociales sur dividendes ? Qui doit les payer ? Sont-elles déductibles ? Si oui, comment ?

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