Ce mercredi 27 septembre 2023, le gouvernement a déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le projet de loi de finances pour 2024.

Nous vous en proposons un résumé portant sur 3 mesures, rédigé à chaud.

Comme chaque année le texte devrait être amendé et enrichi lors de la procédure parlementaire.

Certaines modifications attendues (réforme du dispositif applicable aux loueurs en meublé par exemple) sont absentes du projet. On attendra les débats et aussi le dépôt d’un éventuel projet de loi de finances rectificative pour 2023.

On soulignera que la publication de ce projet est concomitante à celle d’un rapport parlementaire consacré à la fiscalité du patrimoine qui pourrait contribuer à apporter du piquant lors des débats. (Rapport d’information par la commission des finances, de l’économie générale du contrôle budgétaire en conclusion des travaux d’une mission d’information relative à la fiscalité du patrimoine n° 1678 du 27 septembre 2023)

Comme chaque année, nous aurons le plaisir de vous retrouver dans 15 villes pour notre journée de formation en présentiel consacrée au panorama de l’actualité fiscale. Nous effectuerons une synthèse opérationnelle des nouveautés légilsatives, doctrinales et jurisprudentielles de l’année écoulée. 

I.  Quel avenir pour la fiscalité du patrimoine ?

Le rapport présenté par deux députés (Jean Paul Mattei et Nicolas Sansu) réalise un audit de notre fiscalité patrimoniale et suggère plusieurs pistes d’évolution. Ce travail de synthèse sera t-il repris en tout ou partie lors des futurs débats parlementaires ?

27 pistes sont ainsi explorées ; On attirera particulièrement votre attention sur les recommandations n° 5 (augmentation du taux de la Flat-tax) ; n° 13 (taxation des contrats d’assurance-vie) ; n° 16 (vente des titres ayant été préalablement transmis à titre gratuit sous couvert du dispositif Dutreil) ; n° 20 (rapprochement des régimes applicables aux revenus fonciers et aux BIC).

A.   Fiscalité de la détention et des revenus du capital financier (ISF / PFU)

Recommandation n° 01 : Lors de la déclaration en ligne des revenus, améliorer l’information pour permettre aux contribuables ayant intérêt à voir leurs revenus mobiliers imposés au barème de l’impôt sur le revenu (IR) d’opter plus aisément pour cette modalité d’imposition.

Recommandation n° 02 : Étudier la possibilité d’appliquer une retenue à la source sur les plus-values mobilières.

Recommandation n° 03 : Déterminer la fiscalité applicable aux revenus d’assurance-vie en fonction de l’ancienneté réelle des versements et non de la date d’ouverture du contrat.

Recommandation n° 04 : Repenser le régime fiscal de l’épargne retraite afin que ses avantages ne soient pas concentrés sur les contribuables à hauts revenus.

Recommandation n° 05 : Pour accroître la contribution des revenus du capital au redressement des finances publiques, prévoir une hausse modérée, par exemple de trois points, du taux du prélèvement forfaitaire unique (PFU) à l’IR.

Recommandation n° 06 : Pour financer les nécessaires investissements dans la transition climatique, envisager la mise en place au niveau européen de prélèvements exceptionnels et explicitement temporaires sur le patrimoine des contribuables les plus riches, dont le montant serait calibré ex ante en fonction du coût anticipé pour les finances publiques

Recommandation n° 07 : Lancer une réflexion sur un impôt mondial sur le patrimoine détenu par les ménages les plus riches, afin de financer des aides aux pays les plus pauvres.

Recommandation n° 08 : Pour faire mieux contribuer le patrimoine financier conservé dans des holdings patrimoniales, relever les différentes quotes-parts pour frais et charges (QPFC) applicables aux remontées de dividendes ou aux plus-values de cessions de participations.

B.   Fiscalité des donations et des successions

Recommandation n° 09 : Accorder à la DGFiP les moyens nécessaires pour mener à bien de façon prioritaire la modernisation de l’enregistrement des déclarations de donations et successions (e-Enregistrement).

Recommandation n° 10 : Traiter de façon exhaustive les informations figurant dans les déclarations de donations et successions pour déterminer la progressivité effective des DMTG, et pour connaître l’incidence, à ce titre, du barème, des abattements et des dispositifs successoraux de faveur selon les niveaux de revenus et de patrimoine des bénéficiaires.

Recommandation n° 11 : Apporter au barème et aux abattements des DMTG des évolutions visant prioritairement à réduire les écarts de fiscalité selon le degré de parenté pour adapter la fiscalité aux évolutions des schémas familiaux et en particulier réduire les différences de traitement fiscal entre enfants au sein des familles recomposées.

Recommandation n° 12 : Adapter les bornes d’âge applicable à l’exonération de droits aux titres de dons de sommes d’argent consentis en pleine propriété dans un cadre familial.

Recommandation n° 13 : Aligner le taux marginal supérieur du prélèvement applicable aux transmissions d’assurance-vie sur le taux marginal supérieur applicable aux successions en ligne directe.

Recommandation n° 14 : Rassembler et diffuser des informations exhaustives sur l’utilisation des pactes Dutreil, les catégories d’entreprises bénéficiaires, la distribution des avantages fiscaux qu’il procure et les durées effectives de détention des titres transmis.

Recommandation n° 15 : Définir de manière plus précise la notion d’activité d’une société.

Recommandation n° 16 : Pour garantir un traitement fiscal plus équitable en cas de cession à titre onéreux des titres transmis sous le régime d’un pacte Dutreil, retenir pour le calcul de la plus-value de cession réalisée, comme valeur d’acquisition des titres, la valeur des titres au jour de leur transmission à titre gratuit après application de l’exonération de 75 %.

C.   Fiscalité immobilière

Recommandation n° 17 : Indexer le seuil d’assujettissement à l’IFI sur l’inflation.

Recommandation n° 18 : Plafonner l’abattement de 30 % sur résidence principale existant dans l’assiette de l’IFI à 600 000 euros.

Recommandation n° 19 : Mettre en place un système de pré-remplissage des déclarations IFI par la DGFiP, et examiner la possibilité de mettre en place un système de tiers déclarants, qui serait sécurisant pour le contribuable et une garantie sur la qualité de la déclaration.

Recommandation n° 20 : Mettre en place un régime foncier unique intermédiaire entre les actuels régime micro-foncier applicable à la location nue et régime micro-BIC applicable à la location meublée

Recommandation n° 21 : Remplacer les abattements pour durée de détention par l’actualisation de la valeur d’acquisition du bien en fonction d’un indice statistique (inflation, coût de la construction) pour déterminer la plus-value imposable. L’exonération sur la résidence principale serait maintenue. En raison du côté systémique de la mesure, prévoir un délai de prévenance.

Recommandation n° 22 : Faire en sorte que la révision des valeurs locatives cadastrales soit bien mise en œuvre d’ici 2028.

Recommandation n° 23 : Réfléchir à un critère de revalorisation annuelle des valeurs locatives cadastrales qui reflète davantage l’évolution des marchés immobiliers locaux.

Recommandation n° 24 : Lancer une réflexion sur une évolution de la base d’imposition à la taxe foncière pour remplacer les valeurs locatives cadastrales par une estimation de la valeur vénale.

Recommandation n° 25 : Fournir aux décideurs locaux des informations statistiques précises sur la nature des contribuables assujettis aux taxes foncières dans leur commune (particuliers, entreprises, taille de l’entreprise le cas échéant…).

Recommandation n° 26 : Remédier à la perte du pouvoir de taux des départements du fait de la réaffectation de la part départementale de la taxe foncière, en élargissant le pouvoir de taux sur les DMTO.

Recommandation n° 27 : Réfléchir à une modalité d’imputation des DMTO déjà payés par un acquéreur lors de l’acquisition de sa résidence principale sur ceux à payer en cas de revente du bien pour assurer l’acquisition d’une nouvelle résidence principale, afin de fluidifier le parcours résidentiel.

II. Projet de loi de finances pour 2024

On commentera ici trois mesures du projet

A.   Prise en compte du contexte inflationniste

Le projet prévoit d’indexer les tranches du barème de l’IR (et des seuils associés) de 4,80 %.

Les grilles de taux de prélèvement par défaut du prélèvement à la source de l’IR sont ajustées dans la même proportion.

Les taux d’imposition restent inchangés et varient de 0 à 45%.

Le texte du projet souligne qu’en l’absence d’une telle indexation, le rendement de l’IR sur les revenus 2023 serait majoré d’environ 6,1 Md€. La mesure a pour objectif de neutraliser les effets de l’inflation sur le niveau d’imposition des ménages. L’indexation du barème de l’IR sur le niveau de l’inflation hors tabac a pour mission de maintenir un niveau d’imposition identique à revenus stables en euros constants.

B.   Une nouveauté : mise en place du régime fiscal du plan d’épargne avenir climat

Une future loi relative à l’industrie verte devrait très prochainement créer le plan d’épargne avenir climat (PEAC), un nouveau produit d’épargne, exclusivement réservé aux personnes âgées de moins de 21 ans.

L’objectif de ce plan est de permettre à ces personnes de constituer une épargne de long terme, largement orientée vers le financement de l’économie productive et de la transition écologique, pour préparer leur entrée dans la vie active.

Le texte prévoit d’exonérer d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux les revenus générés par ce plan.

Corrélativement, est supprimée la possibilité pour les mineurs d’ouvrir un plan d’épargne retraite (PER). Cette restriction est proposée afin de limiter les comportements d’optimisation fiscale liés à la déductibilité des versements volontaires de l’assiette de l’impôt sur le revenu.

C.   Aménagement de la fiscalité du logement

Plusieurs aménagements de la fiscalité du logement sont envisagés en faveur :

  • du soutien à l’accession à la propriété des ménages aux revenus les plus modestes ;
  • de l’amélioration de la performance énergétique globale des logements ;
  • de leur adaptation à la perte d’autonomie ou au handicap de leurs occupants ainsi que de la promotion de la sobriété foncière.

Dans un contexte notamment marqué par la hausse des taux d’intérêt, le texte propose de  proroger pour quatre ans, soit jusqu’au 31 décembre 2027, le dispositif de prêt ne portant pas intérêt destiné à financer la première accession à la propriété(PTZ).

Cette prorogation, qui permet de maintenir le soutien à la première accession à la propriété des ménages dont les revenus sont modestes, est assortie d’un recentrage du dispositif visant à en renforcer l’efficacité et à limiter son impact en matière d’artificialisation des sols et d’étalement urbain. De même, la prorogation exclut des travaux finançables par le PTZ l’installation d’un dispositif de chauffage fonctionnant aux énergies fossiles.

Il est aussi proposé de prolonger pour quatre ans, soit jusqu’au 31 décembre 2027, le dispositif de prêt ne portant pas intérêt pour financer certains travaux d’amélioration de la performance énergétique globale des logements (éco-PTZ) afin de maintenir le soutien apporté aux ménages réalisant des travaux de rénovation énergétique dans leur logement.

Cette prorogation est assortie de plusieurs ajustements visant à simplifier le recours au dispositif et à le renforcer, consistant en l’extension de sa distribution aux sociétés de tiers‑financement, au couplage de l’éco-PTZ « Copropriétés » avec le dispositif MaPrimeRénov’ Copropriétés, et à la révision à la hausse des plafonds d’aide et de la durée de remboursement maximale applicables à certaines opérations.

Le projet confirme l’éligibilité des sociétés civiles de placement immobilier dont le capital est détenu en totalité, directement ou indirectement, par des personnes passibles de l’impôt sur les sociétés au dispositif de soutien aux investisseurs institutionnels dans le logement locatif intermédiaire (LLI).

Ce dispositif serait renforcé, en procédant à son extension à « l’ancien rénové » ainsi qu’à l’élargissement de son périmètre géographique.

En outre, les pouvoirs publics proposent d’inciter à la rénovation lourde du parc locatif social ancien.

Il est prévu de faire bénéficier les logements les plus anciens réhabilités en vue de leur donner une « seconde vie » d’une exonération de longue durée de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), à l’instar de celle dont bénéficient les constructions neuves.

Seront ainsi éligibles à cette exonération les logements locatifs sociaux achevés depuis au moins 40 ans, lorsqu’ils font l’objet de travaux permettant cumulativement une amélioration de leur performance énergétique et environnementale avec le passage d’un classement « F » ou « G » avant travaux à un classement « B » ou « A » après travaux, et le respect des normes d’accessibilité, de qualité sanitaire ou de sécurité d’usage à l’issue des travaux. Des adaptations sont prévues pour les logements sociaux situés en outre-mer afin d’y rendre applicable ce dispositif.