AUMONT~1ENTRETIEN AVEC Me FREDERIC AUMONT,

Notaire, Formateur pour FAC JD 

Jacques DUHEM (J.D): L’année jurisprudentielle 2012 a été riche en matière de droit patrimonial de la famille. Plusieurs décisions sont revenues sur la notion d’intention libérale. Pourquoi ce thème de l’intention libérale est-il à l’honneur ?

Frédéric AUMONT (F.A) : La notion d’intention libérale a été fortement redéfinie par la Cour de cassation à l’occasion de plusieurs décisions au cours de l’année 2012.

 Nous savons que le code civil définit c’est qu’est une libéralité mais ne définit pas ce qu’est une intention libérale. Or, dans les relations familiales, l’intention libérale peut être sous-jacente à un certain nombre d’actes patrimoniaux.

J.D : A quoi penses-tu en particulier ?

 F.A : Le cas le plus fréquent est le logement d’un enfant. Est-ce forcément constitutif d’une libéralité de loger un enfant dans un appartement qui appartient aux parents ? Ces dernières années, la jurisprudence avait tendance à répondre par l’affirmative. La Cour de cassation a recadré le débat en affirmant qu’en soit le logement d’un enfant sans que celui-ci ne paye de loyer ne pouvait être constitutif d’une libéralité.

La Cour de cassation a indiqué qu’il convenait en la matière de démontrer qu’il y avait intention libérale de la part des parents.

Cass. 1er civ. 18 janvier 2012, n° 11-12863 (Texte intégral en cliquant ICI)

Cass. 1ere civ. 30 janvier 2013, n° 11-25.386  (Texte intégral en cliquant ICI)

« Attendu d’abord, qu’en estimant souverainement que la jouissance par Mme D. de l’immeuble qui lui avait été attribué avait pour contrepartie son engagement de supporter l’ensemble des charges grevant l’immeuble, la cour d’appel a écarté l’intention libérale et, par là-même, exclu l’existence d’une libéralité »

J.D : Cette notion d’intention libérale apparait également en matière de démembrement ?

F.A : Oui, notamment lorsque l’usufruitier procède à des constructions. Et là ce n’est pas un cohéritier lésé qui a agit mais l’administration fiscale. Une fois de plus, la Cour de cassation a rappelé les principes : pas d’intention libérale dès lors que l’usufruitier avait un intérêt à construire sur un terrain dont il n’avait que l’usufruit !

 Ces décisions de la Cour de cassation nous rappellent que l’intention libérale ne se présume pas mais doit se démontrer.

Cass. Civ. 3e ch. Civ. 19 septembre 2012, n° 11-15460 (Texte intégral en cliquant ICI)

Cass. Civ. 1e ch., 18 janvier 2012, n° 11-12863 (Texte intégral en cliquant ICI)

«Attendu qu’en application de l’article 578 du Code Civil, l’usufruitier dispose du droit de jouir du bien, notamment, comme en l’espèce, d’édifier des constructions sur les terrains dont il a l’usufruit, et de recueillir les fruits que peut produire le bien, éventuellement après adjonction d’éléments valorisant celui-ci ;

Attendu en l’espèce que les constructions qui ont été édifiées sur les terrains ont valorisé l’usufruit et ont été mises en œuvre pour permettre à l’usufruitier d’avoir des revenus locatifs subséquents ;

Attendu en conséquence qu’il n’est pas démontré que Monsieur Y…, dont l’objectif a été de valoriser son usufruit, a réalisé les constructions dans une intention libérale au profit de sa fille qui n’en percevra aucun bénéfice avant l’extinction de l’usufruit viager, ni par conséquent que le coût des travaux de construction a constitué une donation indirecte ; qu’il y a lieu de prononcer le dégrèvement des rappels de droits d’enregistrement et des pénalités.

J.D : Merci Frédéric pour cet éclairage. Nous aurons le plaisir de te retrouver tout prochainement à Lyon (le 22 mars) et à Paris (le 4 Avril) pour une formation consacrée au panorama de l’actualité du droit patrimonial de la famille. Tu reviendras à cette occasion en détail sur ces jurisprudences.

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Démembrement - Donation indirecte - Frédéric Aumont - Intention libérale -