On avait spéculé, il y a quelques mois, sur une éventuelle suppression de l’ISF. La LFR pour 2011, l’avait maintenu dans une version allégée.

La LFR pour 2012 actuellement en discussion devant l’assemblée modifie à nouveau le fonctionnement de cet impôt sur le patrimoine .

La lecture du rapport parlementaire fournit quelques indications intéressantes sur la philosophie de la réforme.

L’article 3 du projet institue, au titre de l’année 2012, une contribution exceptionnelle sur la fortune, calculée de manière telle que l’imposition sur la fortune due par les personnes physiques sur la détention de leur capital en 2012 soit d’un niveau équivalent à celle qui était applicable en 2011. 300 000 redevables sont concernés et le rendement de cette contribution est estimé à 2,325 milliards d’euros.

Ce texte a été adopté le 16 juillet en première lecture par l’Assemblée Nationale.

Le rapport souligne que le coût pour le budget de l’État de l’ensemble de la réforme de l’ISF adoptée en 2011 a été estimé à 1,857 milliard d’euros à l’occasion de la première loi de finances rectificative. En réalité, comme le Rapporteur général l’a démontré dans son rapport sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2011, ce coût serait supérieur de l’ordre de 400 millions d’euros. En effet, le produit de l’ISF en 2011 s’établit en exécution à 4,3 milliards d’euros alors qu’il était prévu à 3,873 milliards d’euros. Cet écart serait imputable à une croissance spontanée de l’impôt supérieure à la prévision, liée notamment au dynamisme des marchés financiers et immobiliers. En d’autres termes, le rendement réel de l’ISF 2011 est plus important que celui qui avait été prévu par le précédent Gouvernement, ce qui aboutit à ce que le manque à gagner résultant de la réforme de son barème en 2012 soit d’autant plus élevé.

Le Gouvernement souhaite que l’ISF payé en 2012 soit équivalent à celui payé en 2011, sans plafonnement. Cela signifie de ne conserver de la première loi de finances rectificative pour 2011 que la disposition portant le seuil d’exonération de 800 000 euros à 1,3 million d’euros.

Le retour à un barème progressif

C’est pourquoi il est proposé le rétablissement d’un barème progressif de l’ISF à sept tranches, mais avec une application limitée aux patrimoines supérieurs à 1,3 million d’euros. Il en résulterait un surcroît d’imposition de l’ordre de 2,325 milliards d’euros. Le montant cumulé pour 2012 de l’ISF (2,436 milliards d’euros) et de la contribution exceptionnelle, soit 4,761 milliards d’euros, est à comparer avec l’ISF 2011 (4,3 milliards d’euros). L’écart positif de 461 millions d’euros correspond, d’une part, à l’évolution naturelle du patrimoine des assujettis et, d’autre part, à l’absence de mécanisme de plafonnement applicable en 2012.

Pour obtenir le résultat escompté, le Gouvernement s’est heurté à une difficulté pratique. Compte tenu de son mode de perception, l’ISF dû au titre de l’année 2012 a été déclaré et payé le 15 juin dernier pour les redevables dont le patrimoine est égal ou supérieur à 3 millions d’euros. Il n’est donc pas possible de procéder à une nouvelle liquidation de l’ISF déjà acquitté avec un retour au barème applicable en 2011.

Deux options étaient alors envisageables pour tenter d’atteindre ce résultat. La première aurait consisté à instituer, comme en 1995, une majoration de la cotisation d’ISF déjà perçue. Mais la solution retenue en 1995 était possible parce que la majoration s’appliquait alors à un barème progressif ; dès lors que l’ISF déjà perçu au titre de 2012 l’a été sur la base d’un barème en taux moyen, il n’est pas possible de rétablir un barème progressif au moyen d’une majoration de l’impôt payé. C’est pourquoi la deuxième option, qui a été retenue, consiste à instituer une nouvelle contribution sur la fortune au titre de l’année 2012, calculée selon le barème de l’ISF 2011, et à en déduire les montants déjà payés au titre de l’ISF 2012, afin d’éviter en quelque sorte une double imposition du même patrimoine au titre de la même année. Le résultat finalement recouvré sera donc celui correspondant à un ISF au barème 2011, qui aura absorbé l’ISF au barème 2012.

Le calcul de la contribution exceptionnelle s’effectue à partir d’un barème progressif à sept tranches qui figure au II du présent article et qui est la reproduction à l’identique de celui qui figurait à l’article 885 U du code général des impôts en 2011, avant sa modification par la première loi de finances rectificative pour 2011. Compte tenu du gel du barème de l’impôt sur le revenu opéré par la dernière loi de finances rectificative pour 2011, les montants en cause n’ont pas à être revalorisés.

BARÈME DE L’ISF 2011

Fraction de la valeur nette taxable du patrimoine (en euros) Taux (en %)
N’excédant pas 800 000 0
Supérieure à 800 000 et inférieure ou égale à 1 310 000 0,55
Supérieure à 1 310 000 et inférieure ou égale à 2 570 000 0,75
Supérieure à 2 570 000 et inférieure ou égale à 4 040 000 1
Supérieure à 4 040 000 et inférieure ou égale à 7 710 000 1,3
Supérieure à 7 710 000 et inférieure ou égale à 16 790 000 1,65
Supérieure à 16 790 000 1,8

Une fois le montant brut de la contribution ainsi calculé, la loi indique comment obtenir le montant de la contribution nette, après déduction de la cotisation d’ISF due au titre de l’année 2012.

Il est notamment prévu que la cotisation d’ISF à imputer sur le montant de la contribution exceptionnelle ne tient pas compte des réductions d’ISF au titre des personnes à charge (article 885 V), des souscriptions au capital de PME (article 885-0 V bis) et des dons à certains organismes d’intérêt général (article 885-0 V bis A). Le montant de la première de ces réductions d’impôt a été doublé (passant à 300 euros par personne à charge) par la première loi de finances rectificative pour 2011, et les deux autres ont été instituées par la loi TEPA. Ne pas imputer ces réductions sur la cotisation d’ISF à prendre en compte pour calculer la contribution exceptionnelle permet de préserver l’application de ces réductions d’impôt, qui s’appliqueront effectivement sur le montant de l’ISF dû au titre de 2012 et ne seront pas en quelque sorte absorbées par la nouvelle contribution exceptionnelle. En revanche, il ne peut être admis d’utiliser deux fois ces réductions d’impôt, à la fois pour l’ISF et pour la contribution exceptionnelle. De ce fait, en cas d’excédent des réductions d’impôt par rapport à l’ISF dû, celles-ci ne pourront pas servir à réduire pour le solde la contribution exceptionnelle. On rappellera qu’en tout état de cause le montant total des réductions d’impôt au titre de l’ISF PME et de l’ISF dons ne peut pas excéder 45 000 euros au titre d’une même année d’imposition.

Du fait de sa suppression par la première loi de finances rectificative pour 2011, aucun mécanisme de plafonnement ne s’appliquera en 2012, ni pour l’ISF, ni pour la contribution exceptionnelle, ni pour le cumul des deux. En revanche, il convient de rappeler que le paiement de l’ISF peut être réalisé par imputation sur la cotisation due de la créance détenue sur l’État par le contribuable au titre du droit à restitution des impositions directes en fonction du revenu (il s’agit de la procédure dite d’auto-liquidation du bouclier fiscal, qui permet en 2012 de réduire le montant d’ISF à payer grâce au bouclier qui a encore pu être activé en 2011).

La simplification des modalités de déclaration et d’acquittement de l’ISF apportée par la première loi de finances rectificative pour 2011, qui s’est appliquée pour l’ISF 2012, trouve également à s’appliquer pour la contribution exceptionnelle. Ainsi, pour les 240 000 foyers redevables de l’ISF dont le patrimoine imposable est inférieur à 3 millions d’euros, la déclaration d’ISF a été intégrée dans la déclaration annuelle des revenus, de sorte que l’ISF pour ces redevables est recouvrable par voie de rôle (un rôle distinct du rôle de l’impôt sur le revenu). Dès lors que les mêmes éléments qui ont déjà été déclarés suffisent pour calculer la contribution exceptionnelle, celle-ci fera donc l’objet d’un rôle, qui sera commun avec le rôle d’ISF. Aucun versement provisionnel ne sera dû par le redevable et la contribution exceptionnelle sera acquittée en une seule fois, en même temps que l’ISF 2012, à l’automne.

En revanche, pour les 60 000 foyers redevables de l’ISF dont le patrimoine est supérieur à 3 millions d’euros, une déclaration accompagnée du paiement de l’ISF a déjà dû être souscrite, au plus tard le 15 juin. Il est donc prévu une nouvelle échéance spécifique pour la contribution exceptionnelle, au 15 novembre 2012. Compte tenu de la date d’adoption du présent projet de loi par le conseil des ministres, il n’a en effet pas été possible de prévoir, comme l’an dernier pour l’application des nouvelles dispositions relatives à l’ISF contenues dans la première loi de finances rectificative pour 2011, que la déclaration et le paiement de l’impôt puissent être reportés du 15 juin au 30 septembre.

Le tableau suivant permet de mesurer les conséquences financières pour les contribuables résultant de la contribution exceptionnelle selon le niveau de patrimoine détenu. Il indique le montant moyen à payer au titre de la contribution exceptionnelle et le compare, en ajoutant le montant moyen payé au titre de l’ISF 2012, à ce qu’aurait été une imposition sur le patrimoine sous le régime de l’ISF 2011 (y compris donc avec le mécanisme de plafonnement).

Pour visualiser le tableau, merci de cliquer sur le lien ci dessous:

MONTANTS MOYENS PAYÉS EN 2012 AU TITRE DE L’IMPOSITION DU PATRIMOINE

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